Homélie pour la Commémoration de tous les fidèles défunts
Abbaye Notre-Dame des Neiges, 2 novembre 2025
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Comme vous le savez sans doute, chacune des prières eucharistiques utilisées pour la messe contient un memento des défunts, c’est à dire une invocation en vue de ces défunts. Durant ces memento nous pouvons prier pour ces âmes de défunts qui nous sont chers. Le 2 novembre nous prions particulièrement pour tous les défunts. C’est une sorte de commémoration générale. Qui sont au juste ces défunts pour lesquels nous prions, et où sont-ils ?
Vous pensez peut-être que la question appelle une réponse évidente. Les défunts sont les morts. Oui bien sûr, mais encore ? Les défunts pour lesquels nous prions sont ceux qui attendent. Ils ont besoin de nos prières. Ils attendent quelque part, et ils attendent quelque chose, et ils l’attendent douloureusement même si ils sont sûrs d’y parvenir un jour. Il y a aussi ceux qui n’attendent pas nos prières. Ce sont d’une part ceux qui sont déjà au Ciel et aussi ceux qui auraient choisi délibérément de ne jamais aller au Ciel, refusant ainsi éternellement l’amour de Dieu pour eux. Comme nous ne savons où sont tous ces défunts, nous prions donc pour tous, sachant que ceux qui n’en auraient plus besoin mais qui seraient capables d’en bénéficier, ne laisseraient pas perdre cette prière, la transformant d’une manière ou d’une autre au bien de ceux qui en ont vraiment besoin.
La catégorie de défunts qui nous intéresse le plus (si je puis dire), ce sont donc ceux qui attendent. Ils attendent de pouvoir voir Dieu. Ils nous sont donc très proches, car nous aussi nous espérons voir Dieu un jour. On parle d’eux comme faisant partie des âmes du purgatoire. Ces âmes n’étaient pas encore prêtes à l’heure de leur mort à voir Dieu. Quelque chose en elles n’était pas prêt. En cela aussi ces défunts peuvent nous être très proches. Car nous aussi nous devons progresser dans notre chemin vers Dieu et laisser Dieu nous préparer à Le voir éternellement. Eux n’ont juste pas su laisser faire la grâce, ils n’ont pas suffisamment renoncé à des attaches impropres à la vision de Dieu. Peut-être sommes nous aussi dans cette situation aujourd’hui ? Seulement nous, nous pouvons encore corriger le tir. Elles, ne le peuvent plus. Tout cela nous permet d’éprouver une grande compassion pour ces âmes. Car comme je viens de le dire, autant nous pouvons encore agir et nous convertir, autant elles, elles ne le peuvent plus ! Pourtant une chose les différencient singulièrement de nous. Elles savent que leur attente aboutira à la vision de Dieu. Elles ne courent plus aucun risque. Le tunnel dans lequel elles se trouvent aboutit au Ciel, immanquablement : ce n’est plus qu’une question de temps.
Cet état de purgation les met dans une situation particulière. Car si elles ne peuvent plus rien pour se préparer à voir Dieu, et si elles attendent qu’un feu purificateur leur donne enfin la plénitude de la vision de Dieu, ces âmes peuvent cependant quelque chose pour nous ! Il est donc de notre intérêt de prier pour elles, non seulement pour les soulager de ce temps de préparation qui reste spirituellement douloureux, mais aussi parce que ces âmes ne sont pas ingrates et qu’elles savent se souvenir de ceux qui les ont aidées. La charité qui les anime et les prépare peut en effet leur permettre d’intercéder pour ceux qui sont encore sur terre et avancent dans la foi. Elles peuvent elles aussi éprouver de la compassion pour cette Église militante dont nous sommes, et qui connaît bien des obstacles et des tentations. Ces âmes désirent en effet ardemment notre salut final, elles cherchent à nous attirer vers Dieu autant que Dieu le leur permet. Ces sont donc de vraies amies !
Prions donc pour toutes ces âmes que nous avons connues, mais aussi pour celles qu’on ne connaît pas et pour lesquelles personnes ne prie peut-être plus. Nous sommes assurés de leur faire du bien, et nous sommes aussi assurés qu’elles nous viendront promptement en aide sur notre chemin de foi !
Pour finir je désire dire un mot concernant ces âmes pour lesquelles nous pouvons craindre le pire. Nous savons qu’elles ont mené un existence déplorable si bien que leur salut éternel peut légitimement nous préoccuper. Aussi je vous invite à tourner vos yeux – ou votre imagination – vers un vitrail de l’église paroissiale du village de Montligeon. Lorsque l’on entre dans cette église aux deux transepts, et que l’on avance juste devant soi, on peut admirer à droite d’un autel, un vitrail représentant cinq personnages : Dieu le Père, un ange qui tient une balance, un autre qui tient le livre des actions de l’âme, une âme qui passe en jugement, et enfin la Vierge-Marie. Tandis que l’avenir éternel de l’âme en question semble franchement compromis du fait du poids de ses péchés qui font pencher le plateau de la balance du mauvais côté –mouvement suggéré par à un petit diablotin cornu assis dans un plateau de la balance–, Marie pose ostensiblement la main sur l’autre plateau de la balance, la fait pencher du côté du salut éternel, et fixe simultanément du regard notre Père des Cieux. Le pécheur semble sauvé. Et l’on croit pouvoir lire dans le regard incrédule de Notre Père : « si Elle s’y met, forcément, que voulez-vous que je dise ! ». Et Dieu lui-même garde le silence !
Confions donc aussi toutes ces âmes de nos chers défunts à la très puissante intercession de la Vierge-Marie.

1 commentaire
Gamarra · 07/11/2025 à 7 h 53 min
Merci pour vos magnifiques homélies!!!!!!!!!!