Homélie pour le 2e dimanche de l'Avent 2022

« Convertissez-vous, car le royaume des Cieux est tout proche. » Cette invitation pressante, frères et sœurs, vous la connaissez bien. Elle sera formulée par Jésus au tout dé-but de son ministère public en Galilée (cf. Mt 4, 17). Dans l’évangile que nous venons d’en-tendre, pourtant, cette exhortation n’est pas placée dans la bouche de Jésus, mais dans celle de Jean le Baptiste. Cette correspondance entre la parole de Jean et celle de Jésus illustre parfaitement le sens de la mission du Baptiste. Jean est envoyé par Dieu pour préparer le chemin du Seigneur. Le message qu’il proclame dans le désert est comme un avant-goût de celui du Christ. Il devance le messie. Il court en avant de lui. Il est le « pré-curseur ».

Frères et sœurs, vous le savez, le temps de l’Avent oriente nos regards vers le triple avènement du Christ : sa venue dans la crèche de Bethléem il y a deux mille ans, sa venue dans la gloire à la fin des temps, et sa venue dans notre cœur à chaque instant de notre vie. Eh bien, à chacun de ces trois avènements, Jean Baptiste est envoyé pour préparer les hommes à accueillir le Fils de Dieu.

En ce temps de l’Avent, nous sommes invités à nous unir à l’attente d’Israël, que Dieu, par la voix des prophètes, a préparé à la venue du messie. Par son vêtement de poils de chameau et sa ceinture de cuir autour des reins, Jean peut être identifié à Élie, figure prophétique par excellence. À travers la prédication du Baptiste, c’est donc celle de tous les prophètes de l’Ancien Testament qui est convoquée pour avertir le peuple d’Israël que l’inauguration des temps messianiques est toute proche. « Un rameau sortira de la souche de Jessé » venons-nous d’entendre dans la première lecture. Si, dans cette heureuse promesse, le prophète parle d’une souche, c’est donc que l’arbre a été abattu. « Déjà la cognée se trouve à la racine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu. » Malgré les avertissements de Jean et de tous les prophètes, la vigne d’Israël n’a pas porté les fruits que Dieu en attendait. Et Jésus le dira plus tard aux grands prêtres et aux pharisiens : « Le royaume de Dieu vous sera enlevé pour être donné à une nation qui lui fera produire ses fruits. » (Mt 21, 43). Ayant été rejeté par les chefs de son peuple lors de sa venue dans la chair, le Christ a alors ouvert son royaume aux nations païennes. Dans sa lettre aux Romains, saint Paul décrit ce beau mystère à travers l’image de l’olivier franc, qui représente Israël, et dont certaines branches ont été coupées pour qu’y soient greffés des rameaux sau-vages. Mais il prend soin de nous avertir, nous qui avons été greffés sur la souche du peuple élu : « Ne fais pas le fanfaron, sois plutôt dans la crainte. Car si Dieu n’a pas épargné les branches d’origine, il ne t’épargnera pas non plus. » (Rm 11, 20-21).

Fidèle à sa mission, Jean Baptiste est présent parmi nous aujourd’hui encore pour nous préparer à l’avènement du Christ dans la gloire. Serons-nous prêts à le recevoir au jour de sa venue ? C’est à nous que le précurseur adresse la parole. « Déjà la cognée se trouve à la ra-cine des arbres : tout arbre qui ne produit pas de bons fruits va être coupé et jeté au feu. » Dans les jours à venir, frères et sœurs, vous allez peut-être préparer un arbre de Noël, orné de boules, de guirlandes, voire de fruits déguisés… Mais l’arbre de votre âme, de quels fruits sera-t-il orné lorsque paraîtra le Fils de l’homme ? La parousie se fait attendre, certes. Mais il arrivera bien un jour où nous devrons rendre des comptes à notre Créateur. St Benoît nous rappelle que c’est « pour la correction de nos vices que les jours de cette vie nous sont con-cédés comme un sursis […]. Car, dans sa bonté, le Seigneur dit : “Je ne veux pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse et qu’il vive.” ». Oui, le divin serviteur de la parabole de Luc plaide en notre faveur lorsqu’il implore le maître d’accorder une année supplémentaire au figuier stérile avant de le couper, afin de lui laisser le temps de porter du fruit. Quels sont les fruits que Dieu attend de nous ? Ce sont ceux qui viennent de l’arbre de la croix. Ces fruits, Dieu nous les donne en abondance dans les sacrements. C’est en les recevant que nous nous préparons au jour du jugement. C’est en recevant le Christ chaque jour dans le secret de nos âmes que nous nous préparons à l’accueillir lors de son avènement glorieux.

Frères et sœurs, nous sommes réunis en ce dimanche pour célébrer l’eucharistie. Jésus vient à notre rencontre aujourd’hui et frappe à la porte de notre cœur. Dans la liturgie, c’est encore Jean Baptiste qui va nous préparer à le recevoir, à travers les paroles que prononcera le prêtre : « Voici l’Agneau de Dieu, voici celui qui enlève les péchés du monde. » Jésus vient à nous ce matin dans le sacrement de sa mort et sa résurrection. Avec un repentir sincère, offrons lui tous nos péchés puisqu’il les porte et les enlève, afin qu’il les brûle au feu qui ne s’éteint pas. Unissons-nous à son mystère pascal pour que sa croix porte du fruit en nous, dans toute notre vie. Alors, lorsqu’il viendra dans la gloire, nous pourrons nous présenter devant lui avec ces fruits qu’il nous aura lui-même donnés. Et il nous introduira dans la cité sainte où, chaque mois, l’arbre de vie porte un fruit nouveau. Amen.

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