Homélie pour la fête de l'Epiphanie, 6 janvier 2023

Is 60, 1-6

Ep 3, 2-3a.5-6

Mt 2, 1-12

« Toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus, par l’annonce de l’Évangile. » Frères et sœurs, dans l’épître au Éphésiens, saint Paul nous livre le contenu du mystère célébré en ce jour. Dès avant la fondation du monde, Dieu avait pour les hommes un dessein d’amour : il voulait leur conférer l’adoption filiale dans le Fils unique. Il voulait appeler l’ensemble des créatures spirituelles à vivre en communion avec lui en les réunissant toutes en son Fils. L’irruption du péché dans le monde a apporté un obstacle à la réalisation de ce dessein bienveillant. Mais Dieu n’a pas abandonné son projet pour autant. Il a préparé un plan de salut afin d’ouvrir à nouveau l’accès à la communion divine que les hommes avaient perdue par le péché. C’est ce plan de salut et sa réalisation dans le Christ que saint Paul désigne sous le nom de « mystère ». Ce mystère, nous dit l’apôtre, avait été « gardé depuis toujours dans le silence » (Rm 16, 25). Il « n’avait pas été porté à la connaissance des hommes des générations passées ». Mais lorsque la plénitude des temps fut accomplie, ce mystère nous a été révélé dans le Christ. En lui, Dieu a appelé toutes les nations à recevoir l’adoption filiale en adhérant au Christ par la foi. L’élection dont Israël a fait l’objet lors de l’ancienne alliance est étendue à tous les peuples de la terre. Les mages en sont témoins.

L’évangile nous raconte l’histoire de ces savants venus d’orient. Ils n’appartiennent pas au peuple d’Israël. Ils n’ont pas été prévenus par les anges lorsque l’enfant Jésus est venu au monde, dans la grotte de Bethléem. Et pourtant, Dieu a choisi de leur faire connaître à eux aussi le salut qu’il avait préparé pour l’humanité. Le long voyage qu’ils ont entrepris pour suivre l’étoile nous fait comprendre que ces mages cherchaient leur Créateur en toute sincérité et qu’ils étaient prêts à employer tous les moyens nécessaires pour le trouver. Ils croyaient « qu’il existe et qu’il récompense ceux qui le cherchent » (He 11, 6), pour reprendre l’expression de l’épître aux Hébreux. Ils avaient donc la foi, même si celle-ci était encore inchoative. Cette semence de foi que Dieu avait déposée dans leur cœur était comme la faible lueur d’une étoile dans l’obscurité de la nuit. Et ils se sont accrochés à cette lueur, sûrs de trouver en elle le chemin du salut. L’étoile qui les guidait les a conduits jusqu’en terre d’Israël. « Car le salut vient des Juifs » (Jn 4, 22). Ce sont en effet les hommes religieux d’Israël qui ont su indiquer à ces païens le lieu où ils pourraient rencontrer leur Sauveur. Les mages font confiance à ce que leur disent les scribes. Ils croient à la vérité des Écritures conservées précieusement par les fils d’Israël. Ils adhèrent par la foi à la révélation que le Seigneur a commencé à faire aux hommes par la bouche de ses prophètes. Et cette adhésion spirituelle au peuple bénéficiaire des promesses divines leur ouvre le chemin vers le Sauveur. Vers le salut. La docilité des mages les conduit devant Jésus qu’ils reconnaissent pour leur Dieu et leur Sauveur en l’adorant.

Le peuple élu par Dieu dans l’Ancien Testament a donc une mission particulière dans le plan divin de salut. C’est lui qui est chargé de guider toutes les nations vers le Rédempteur. C’est ce rôle privilégié d’Israël que chante Isaïe dans la première lecture : « Debout, Jérusalem, resplendis ! » Fais briller la lumière que le Seigneur a déposée en toi, pour qu’elle illumine tous les peuples de la terre ! « Les nations marcheront vers ta lumière, et les rois, vers la clarté de ton aurore. » Tous sont appelés à te rejoindre pour former avec toi un seul corps, le peuple des rachetés uni à son Rédempteur, le Christ total. Car « c’est lui, le Christ, qui est notre paix : des deux, le Juif et le païen, il a fait une seule réalité ; par sa chair crucifiée, il a détruit ce qui les séparait, le mur de la haine » (Ep 2, 14). Il a réconcilié « avec Dieu les uns et les autres en un seul corps par le moyen de la croix » (Ep 2, 16). Voilà le mystère qui était caché en Dieu depuis les siècles et qui maintenant a été révélé à toutes les nations. C’est sur la croix qu’il s’est accompli. C’est dans le mystère pascal qu’il a été pleinement manifesté. Aujourd’hui encore, sur l’autel, ce mystère va nous être rendu présent. Comme les mages, adorons-le dans la foi pour avoir part nous aussi à l’héritage promis. Comme les scribes d’Israël, portons cette lumière à tous les peuples par notre prière et notre intercession. Alors, quand l’Église sera pleinement accomplie dans la gloire, nous chanterons tous ensemble la louange de notre Créateur et Rédempteur pour les siècles des siècles. Amen.

Catégories : Homélies