Homélie pour la fête de la Sainte Famille 2020

Gn 15,1-6 ; 21,1-3 ; He 11,8.11-12.17-19 ; Luc 2, 22-40.

Le Fils de Dieu s’est fait fils de l’homme pour que l’homme soit fait fils de Dieu. Il est venu habiter chez les siens, dans une famille humaine, pour que les siens entrent dans la famille de Dieu, la communion des Trois Personnes divines. Dieu est Amour. À son image, la famille humaine est une communion de personnes dans des relations de connaissance et d’amour.

La Sainte Famille est entrée dans le jeu de l’amour de Dieu. Après la naissance de Jésus à Bethléem, à la suite d’un recensement ordonné par César, Joseph et Marie viennent présenter l’Enfant au Temple de Jérusalem : en bons juifs pratiquants, ils accomplissent un rite de la Loi. Comme il y a cinq livres de la Torah, cinq fois, il est répété qu’ils observent toutes les prescriptions de Dieu. Ils obéissant au Père. Mais il est aussi souligné qu’ils suivent les inspirations de l’Esprit-Saint. Depuis l’Annonciation, nous savons que Marie est remplie de l’Esprit, que Joseph en a aussi reçu la révélation ; dans le même Esprit, ils écoutent les prophéties de Siméon et d’Anne. Vraiment, les parents de Jésus ont les sentiments mêmes du Christ Jésus. En entrant dans le monde, le Fils de Dieu s’offre au Père dans l’Esprit : « Tu n’as pas voulu de sacrifice ni d’offrande, mais tu m’as formé un corps. Tu n’as eu pour agréables ni holocaustes ni sacrifices pour le péché. Alors j’ai dit :  »Me voici, je viens, ô Dieu, pour faire ta volonté » ». L’auteur de l’Épître aux Hébreux qui cite ce Ps. 39, commente : « En vertu de cette volonté, nous sommes sanctifiés par l’offrande qu’une fois pour toutes Jésus-Christ a faite de son corps » (Hb 10, 5-10).

Cette offrande fut préfigurée par le sacrifice qu’Abraham fit de son fils Isaac dans sa foi en la promesse. Il est capable d’entrer dans une alliance avec Dieu, dans une relation de confiance, de fidélité qui s’ajuste à la volonté de Dieu. Quand Jésus est présenté au Temple, ses parents, comme le patriarche Abraham, ne retiennent pas pour eux leur enfant, mais le consacrent à Dieu. « Être père, écrit le pape François, signifie introduire l’enfant à l’expérience de la vie, à la réalité. Ne pas le retenir, ne pas l’emprisonner, ne pas le posséder, mais le rendre capable de choix, de liberté, de départs… La logique de l’amour est toujours une logique de liberté. Joseph ne s’est jamais mis au centre. Il a su se décentrer, mettre au centre de sa vie Marie et Jésus » (Lettre apostolique Patris corde n.7).

Marie et Joseph furent des pauvres du Seigneur, comblés de ses dons. Mais n’imaginons pas que tout était simple dans le foyer de la Sainte Famille. Il ont dû cheminer dans l’obscurité de la foi. L’évangile ose avouer que le père et la mère de l’enfant s’étonnaient de ce qu’on disait de lui ; ils ne comprenaient rien quand Siméon donnait à ce bébé des titres prestigieux : Messie du Seigneur, Salut de tous les peuples, Lumière des nations, Gloire d’Israël. De leurs yeux, ils ne voyaient qu’un nouveau-né. La gloire avait englobé les bergers dans la nuit de Noël, mais la crèche restait dans une étable obscure, son secret n’étant accessible que dans une vue de foi.

La Sainte Famille a grandi dans la foi, et aussi dans l’amour : comme est émouvante cette démarche de la Présentation, de la consécration de l’Enfant au Temple ! « Les parents de Jésus le portèrent à Jérusalem pour l’offrir au Seigneur, et présenter en offrande le sacrifice prescrit par la loi du Seigneur ». C’est faire à l’avance ce que Jésus fera librement à la Cène et à la Croix. Les deux petites colombes que le prêtre immole ce jour-là représentent le sacrifice, le don total que Jésus offrira plus tard : son Corps livré, son Sang versé. Ave verum corpus natum de Maria Virgine. « Salut, vrai corps né de la Vierge Marie. Vraiment tu as souffert et tu as été immolé sur la Croix pour les hommes ».

La Sainte Famille a accepté la Croix comme facteur de croissance. L’épreuve a frappé Marie et Joseph de plein fouet : Marie est appelée la Mère des douleurs. Elle n’est encore qu’une jeune maman quand le prophète Siméon lui annonce que son enfant sera un signe de contradiction, et qu’un glaive lui transpercera le cœur. Il serait illusoire de vouloir passer à côté de la croix. La seule issue est, comme Marie au calvaire, d’offrir cette souffrance en union avec celle du Christ. L’oblation est la perfection de l’amour. Aussi l’Apôtre recommande : « Tout ce que vous dites, tout ce que vous faites, que ce soit toujours au nom du Seigneur Jésus Christ en offrant par lui votre action de grâce à Dieu le Père » (Col 3, 2).

La Sainte Famille fut un lieu de croissance humaine et divine : « Ils s’en retournèrent en Galilée, dans leur ville de Nazareth, et l’enfant croissait et se développait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu reposait sur lui ». C’est presque tout ce que nous savons de lui pendant trente ans. Jésus a grandi entre les deux mains de Marie et Joseph (comme Dieu nous éduque par le Fils et l’Esprit). La loi de croissance est la loi première de tout vivant. La relation particulière d’amour dans la famille, cellule de base de la société, peut faire grandir toute la famille humaine dans la charité et la solidarité. La famille de Jésus s’étendra à l’humanité entière.

En cette année consacrée à saint Joseph, qui a aimé Jésus avec un cœur de père, le pape François nous exhorte à nous mettre sous la protection du Gardien de l’Église pour mieux aimer « l’Enfant et sa mère ».

Sainte Marie et saint Joseph, vous qui avez consacré votre enfant au Seigneur, venez nous aider à donner à nos propres enfants la vie éternelle, le Salut pour lequel Jésus a offert sa vie sur la croix, et qui renouvelle ce sacrifice dans chaque messe. Amen.

Jésus, Marie et Joseph en vous nous contemplons la splendeur de l’amour véritable,

à vous nous nous adressons avec confiance.

Sainte Famille de Nazareth, fais aussi de nos familles des lieux de communion et des cénacles de prière, des écoles authentiques de l’Évangile et des petites Églises domestiques.

Sainte Famille de Nazareth, que jamais plus dans les familles on ne fasse l’expérience

de la violence, de la fermeture et de la division :

que quiconque a été blessé ou scandalisé connaisse rapidement consolation et guérison.

Jésus, Marie et Joseph écoutez-nous, exaucez notre prière.

(Pape François – prière à la Sainte Famille à l’occasion du synode)

frère Jean-Gabriel +

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