Homélie pour la solennité de sainte Anne, 26 juillet 2024
Ça y est ! Ce jour de fête attendu par beaucoup depuis longtemps est enfin arrivé. Comme vous le savez, nous célébrons aujourd’hui l’ouverture des jeux olympiques. Des athlètes de toutes nationalités sont arrivés à Paris, bien échauffés pour concourir aux épreuves diverses et variées pour lesquelles ils se sont préparés. Depuis des mois, ils s’entraînent pour la compétition et s’apprêtent maintenant à se mesurer entre eux. Depuis des mois aussi, la capitale choisie pour accueillir ces jeux est dans l’effervescence. Sur les bords de la Seine, on s’active depuis longtemps pour dépolluer l’eau du fleuve. On apprête avec soin les pistes de courses et les gymnases. On veille à ce que les boulevards soient présentables pour les caméras du monde entier. On bloque la circulation dans les quartiers où auront lieu les épreuves sportives. Et on augmente les tarifs des transports en commun. Tout est prêt désormais pour recevoir les coureurs. Mais quelle préparation tout cela a-t-il demandé !
Aujourd’hui, la liturgie attire notre attention sur les préparatifs qui ont été nécessaires à la venue d’un autre athlète : un géant à la double nature qui s’est élancé en conquérant joyeux pour parcourir allègrement la piste. Il est apparu où commence le ciel et s’en est allé jusqu’où le ciel s’achève (Ps 18, 6-7). Car le Très-Haut a envoyé sa parole sur la terre : rapide, son Verbe l’a parcourue (Ps 147, 15). En trente-trois années à peine, le Fils unique est sorti de Dieu, il s’est fait homme, il a arraché leur proie aux enfers, et il est retourné à Dieu, portant sur ses épaules la brebis égarée.
Mais toute cette course était préparée depuis longtemps. Avant d’envoyer son Fils au milieu des hommes, Dieu a veillé à ce qu’il puisse trouver un terrain capable de l’accueillir. Il a choisi un homme, Abraham, à partir duquel il s’est créé un peuple. Quand les fils d’Israël lui ont demandé un roi, il en a trouvé un dans la tribu de Juda. Et dans la descendance de David, il a fait naître le messie. C’est donc dans une famille humaine avec tous ses liens de parenté entre les diverses générations que le Fils de Dieu s’est incarné. En fêtant la grand-mère de Jésus, nous faisons mémoire de tous les ancêtres du Christ qui, par la droiture de leur vie, ont contribué à fournir un terreau favorable à sa venue. Comme nous l’avons entendu dans la première lecture, « leur postérité a persévéré dans les lois de l’Alliance, leurs enfants y sont restés fidèles grâce à eux ».
On sait bien que l’orientation que prend la vie d’un enfant doit beaucoup à l’éducation qu’il a reçue de ses parents. Sans l’exemple et les conseils qui lui ont été prodigués par sa mère, la Vierge Marie n’aurait jamais été ce qu’elle a été. Anne et Joachim ont reçu de Dieu la mission de faire grandir l’Immaculée Conception, de la préparer à la vocation qui était la sienne, de la faire parvenir à maturité pour qu’elle puisse prononcer en toute liberté le oui qui ouvrirait au Rédempteur les portes de notre humanité.
Car Dieu ne veut pas entrer chez nous par effraction. Il désire que nous collaborions à sa venue. Par sa grâce, il continue à nous rendre visite. Pour pouvoir l’accueillir avec fruit, il importe au plus haut point que nous lui préparions le terrain par la droiture de notre vie. « Celui qui fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, déclare Jésus à ses disciples, celui-là est pour moi un frère, une sœur, une mère » (Mt 12, 50). Par notre fidélité à son amour, nous pouvons donc, comme Anne et comme Marie, devenir une mère pour Jésus. Nous pouvons lui permettre de venir s’établir au milieu de nous, de sorte qu’en retour, nous partagions sa vie.
Mais nous ne le savons que trop, de nous-mêmes nous sommes totalement incapables de faire de nos cœurs un terrain digne du Seigneur. C’est pourquoi il vient lui-même à notre secours à travers ses sacrements. Par sa venue, il nous prépare à sa venue. Dans la communion eucharistique, il purifie nos cœurs pour que nous puissions l’accueillir dignement. Demandons-lui donc de venir lui-même préparer en nous la piste pour ses pas. Alors il nous entraînera dans sa course et nous conduira jusqu’au Père. Et tandis que les athlètes des JO se sont imposés une discipline sévère pour recevoir une couronne de laurier qui va se faner, nous recevrons quant à nous la couronne véritable qui ne se fane pas (1 Co 9, 25). Amen.
+ fr. Jean-Vincent, abbé