Homélie pour le 17e dimanche du temps ordinaire 2021

Dans le cycle de l’année B, on lit l’Évangile selon saint Marc. Cependant, au milieu de ce parcours, plusieurs dimanches sont consacrés au discours de Jésus sur le pain de vie relaté par saint Jean. L’introduction en est donnée aujourd’hui par le récit de la multiplication des pains ; puis suivent quatre dimanches sur le discours de Jésus sur le pain de vie ; la conclusion viendra dans quatre semaines par le départ de nombreux disciples qui trouvent le discours de Jésus inacceptable, et par la confession de Pierre : « Seigneur, vers qui pourrions-nous aller ? Tu as les paroles de la vie éternelle ».

Si le récit de la multiplication des pains se trouve dans les quatre Évangiles, le discours sur le pain de vie est propre à saint Jean. Après cette interruption, nous reprendrons la lecture suivie de l’Évangile selon saint Marc.

Le miracle des pains rappelle aux juifs le don de la manne pendant les quarante ans de pérégrination au désert avec Moïse. Et la manne amène Jésus à déclarer qu’il est le pain de vie. Cette déclaration sert de point de départ à l’enseignement eucharistique. Tout cela forme un tout, avec le souci de préparer les esprits à l’acte de foi en la nourriture réelle et spirituelle qu’est le corps et le sang du Sauveur.

L’Eucharistie est le mystère central de notre foi, de même que le Christ est le centre de notre vie spirituelle. Ce mystère est préparé de longue date puisque déjà Moïse, sur le mont Sinaï, en compagnie de 70 anciens d’Israël en reçoit la révélation mystérieuse : « Moïse monta avec Aaron, Nadab et Abihu, et soixante-dix anciens d’Israël. Ils virent le Dieu d’Israël ; sous ses pieds, c’était comme un ouvrage de saphir transparent, comme le ciel lui-même dans sa pureté. Il n’étendit point sa main sur l’élite des enfants d’Israël. Ils virent Dieu, et ils mangèrent et burent » (Ex 24, 9-11).

Élisée multiplie des pains d’orge en temps de famine et Jésus multiplie également des pains pour nourrir une foule qui n’avait pas mangé depuis trois jours. Ce geste est d’abord un geste de réconfort, un geste de secours dans une situation pénible, voire même périlleuse. Mais à travers Élisée ou Jésus qui distribuent un pain matériel, c’est Dieu lui-même qui veut faire comprendre qu’il est le seul à donner le vrai pain, le pain de vie, le pain spirituel qui nourrit notre âme.

Allons plus loin. L’épisode de Moïse dont j’ai parlé se situe dans le cadre de l’Alliance. C’est l’Alliance que Dieu a conclu avec son peuple à la sortie d’Égypte. La multiplication des pains par Jésus est à mettre en relation avec la dernière cène, et la cène avec la Croix sur laquelle Jésus va conclure l’Alliance nouvelle et éternelle. Quand les Juifs mangeaient les mets d’un sacrifice, c’était pour s’unir à Dieu qui, par l’holocauste, mangeait symboliquement les même mets. Quand nous consommons l’eucharistie, c’est pour s’unir à Dieu par Jésus qui est contenu, corps et âme, dans l’hostie.

Le but de toute religion, c’est de s’unir à Dieu pour revenir à celui de qui nous venons. Le souhait de Dieu exprimé dans l’Ancien Testament : « Ils seront mon peuple et je serai leur Dieu » est réalisé dans l’eucharistie. Jésus se donne à manger dans l’eucharistie pour que le Christ soit dans le fidèle chrétien et le chrétien dans le Christ, afin que tous soient un en Dieu, comme le Père est dans le Fils, et le Fils dans le Père.

Nous sommes partis d’une simple nourriture pour combler la faim du peuple, et nous sommes arrivés au but suprême de toute vie : l’union à Dieu, ce qui est le désir le plus profond et intense de toute âme. Mais à côté de la notion de repas et d’Alliance, il faut rajouter en troisième lieu la notion de sacrifice. Car le Christ nous a ouvert les portes du ciel et l’accès à Dieu par son sacrifice sur la croix pour nous donner son corps en nourriture et son sang comme boisson. Qui serait capable de se faire cloué sur une croix. Seulement pour participer aux souffrances et au sacrifice du Christ, celui-ci nous demande bien peu : il veut seulement que nous croyions en lui et que nous ouvrions notre cœur à son amour, pour que cet amour divin se diffuse dans le monde et transfigure la face de la terre.

Amen.

frère Yves-Marie +

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