Homélie pour la messe du jour de Noël 2021

Aux premières heures de cette Nuit sainte, les anges nous ont invités mélodieusement à venir contempler le signe de la venue dans le monde du Sauveur. La joie si pure et si nette de ses créatures angéliques nous a peut-être bouleversés. Il est en effet touchant de constater le degré tellement élevé de cette joie, alors que l’événement qu’ils sont venus annoncer concerne le salut d’une humanité dont ils ne font pas partie. Ces anges de Dieu sont eux-mêmes bouleversés de la joie qui vient d’arriver. La naissance de Jésus les met en liesse, alors qu’ils ne semblent pas, au premier abord, y gagner quoi que ce soit, puisqu’ils n’ont pas besoin, eux, d’être sauvés. Mais alors pourquoi cette joie débordante ?


S’il n’est pas possible de connaître le secret des joies des anges de Dieu, il est au moins envisageable de l’imaginer par analogie. Lorsque le peuple des hébreux apprend que le roi Salomon a été couronné comme roi sur Israël, il est écrit au livre des Rois que « le peuple monta à sa suite, et le peuple jouait de la flûte et manifestait une grande joie, avec des clameurs à fendre la terre »1. Mais y a-t-il vraiment une analogie entre l’avènement du Roi Salomon pour les hébreux, et la naissance du Messie pour les anges ? Et bien oui ! Dès lors que le Fils éternel de Dieu que les anges ont choisi de servir prend une humanité, le Christ qu’il est, devient Roi des anges. La voilà donc aussi cette joie des anges. Eux qui ont choisi de servir Dieu, veulent honorer de tout leur être ce Dieu dont la puissance n’a tellement pas de limite qu’il peut aussi devenir l’un de nous et qui est leur Roi2.


Le même processus qui s’applique aux anges, explique aussi comment Marie peut être appelée en vérité Mère de Dieu, c’est à dire Théotokos, « celle qui a enfanté Dieu ». L’humanité dont se revêt l’éternel Fils de Dieu lui confère cette dignité. Refuser le titre de Théotokos à Marie reviendrait à séparer la divinité de l’humanité de Jésus, ou à admettre que la divinité de Jésus est postérieure à sa conception, toutes choses parfaitement hérétiques.

Ce matin nous sommes donc devant Jésus bébé blotti dans les bras de sa mère Marie, Mère de ce Dieu encore sans parole qui nous parlera toute sa vie de son Père et du chemin qui conduit à Lui. Toute l’histoire de notre salut est là, devant nous. Commencée sur terre depuis Abel, achevée avec le retour du Christ avec tous ses saints. Tout est là.


En venant nous sauver de nos péchés Jésus vient aussi nous parler de son Père qui a voulu dès l’origine tous les moyens de salut nécessaires à l’accomplissement son dessein de salut sur l’humanité, bien avant le péché des origines. Ceci est en mesure de nous faire contempler la bienveillance, la tendresse infinie de notre Père des Cieux. Comme le dira Paul, nous devenons « capables de comprendre avec tous les fidèles quelle est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur… »3. Profondeur telle que le scribe en a perdu la finale, à moins que ce ne fût Paul qui tomba en extase peut-être.


Oui frères et sœurs : tout est là devant nos yeux. Que cette joie angélique nous contamine le plus possible afin que nous chantions nous aussi par toute notre vie la gloire de Dieu. « Gloria in excelsis Deo ». Joyeux Noël !


Amen

1 1R 1,40.
2 L’islam nie cette incarnation et nie aussi par voie de conséquence la toute-puissance de Dieu.
3 Eph 3,18.

+ frère Laurent de Trogoff, prieur administrateur

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