Homélie pour la solennité de l'Assomption de la Vierge Marie 15 août 2025
« Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse. » Frères et sœurs, l’évangile que nous venons d’entendre décrit à merveille le mystère que nous célébrons en ce jour, le mystère de l’Assomption de la Vierge Marie ! Pourtant, me direz-vous, ce texte nous raconte la visite de Marie à sa cousine Élisabeth : cet épisode est tout de même assez différent de celui de son entrée au ciel. Bien sûr ! Mais à travers le mystère de la Visitation, l’Église nous donne à contempler quelque chose de celui de l’Assomption.
Dès le premier verset de la péricope évangélique, nous voyons Marie s’élever. Elle se dirige vers une région montagneuse. Dans la tradition biblique, la montagne est un lieu où l’on s’approche de Dieu. C’est là que Moïse a parlé avec le Seigneur. C’est là que le prophète Élie a fait l’expérience de la présence divine. C’est là que Jésus a prié son Père durant des nuits entières. Marie, elle aussi, se rend à la montagne, dans une ville de Judée. Cette ville située sur la montagne et qui ne peut être cachée, frères et sœurs, ce n’est pas seulement Aïn Karem, le village de Zacharie et Élisabeth. Cette ville de Judée vers laquelle Marie se rend avec empressement, c’est aussi la montagne de Sion, la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste, l’assemblée des premiers-nés dont les noms sont inscrits dans les cieux (He 12, 22-23). C’est donc vers la cité céleste qu’au début de notre évangile nous voyons Marie s’élever.
À peine arrivée à destination, la jeune fille voit sa cousine courir à sa rencontre et la saluer avec effusion : « Tu es bénie entre toutes les femmes, et le fruit de tes entrailles est béni. ». Cet accueil empressé n’est pas sans rappeler celui que, dans une autre ville de montagne, Ozias, chef de Béthulie, fit à la veuve Judith : « Bénie sois-tu, ma fille, par le Dieu Très-Haut, plus que toutes les femmes de la terre ; et béni soit le Seigneur Dieu, Créateur du ciel et de la terre. Car le Seigneur t’a dirigée pour frapper à la tête le chef de nos ennemis. » (Jdt 13, 18). Cette femme héroïque venait en effet de rapporter auprès des siens la tête du général Holopherne qui assiégeait la cité depuis trente-quatre jours. Il restait certes à poursuivre les derniers assaillants, mais la bataille décisive avait été remportée, la victoire était assurée ! De même, Marie, la véritable fille de Sion, se présente aujourd’hui devant la porte du ciel après avoir écrasé la tête de l’antique ennemi, par son oui total à la volonté divine, par sa coopération à l’œuvre rédemptrice. C’est donc avec raison que retentit, au moment où apparaît dans le ciel la Femme revêtue de soleil, une voix plus forte encore que celle d’Élisabeth : « Maintenant voici le salut, la puissance et le règne de notre Dieu, voici le pouvoir de son Christ ! ».
Oui, par la mort et la résurrection de Jésus, la rédemption nous est acquise ! Par le mystère pascal, dont nous célébrons le mémorial en cette Eucharistie, l’accusateur de nos frères a été rejeté ! Nous avons malheureusement tendance à l’oublier quand nous voyons se multiplier sur la terre des conflits de plus en plus insolubles, quand nous voyons nos sociétés s’engouffrer la tête la première dans des idéologies qui conduisent le monde à sa destruction. Certes, le combat n’est pas terminé. Nous avons encore à lutter sur la terre. Une lutte contre le péché, qui commence d’abord dans chacun de nos cœurs. Mais gardons-nous d’oublier que sur le Calvaire la bataille décisive a été remportée ! La victoire finale est assurée ! Marie a été la créature la plus unie à l’œuvre rédemptrice de son Fils. Elle y a collaboré plus que toute autre. C’est pourquoi elle règne avec lui dans les cieux, avec son corps et son âme. Nous aussi, dans la célébration de cette Eucharistie, nous sommes appelés à nous unir au mystère de la rédemption. Nous aussi, dans les combats que nous avons à mener sur la terre, nous participons à la victoire du Crucifié. Nous aussi, nous savons que la bataille est gagnée, que la mort n’aura pas le dernier mot, que tout sera soumis au Christ, et que nous siégerons avec lui dans les cieux.
En cette année jubilaire consacrée à l’espérance, nous sommes invités à partager l’exultation de Marie, qui nous précède au ciel et nous y prépare une place en attendant le jour où l’Église sera pleinement accomplie dans la gloire. Unissons notre voix à la sienne pour chanter les merveilles du Dieu tout-puissant : « Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu, mon Sauveur ! » Amen.